Des sages-femmes pas forcément sages.

Article : Des sages-femmes pas forcément sages.
Crédit:
22 novembre 2017

Des sages-femmes pas forcément sages.

Les femmes sont de nos jours victimes de mutilations génitales. Chaque année il y a lieu de le rappeler, l’humanité consacre une journée entière de célébration mondiale de lutte contre ce phénomène avec le slogan : « Zéro excision ». Est-ce que cela est vraiment une réalité des faits ou bien, une autre façon de tromper l’apparence des gens sur le sujet ? C’est sans doute autant de questions qui me traversent souvent le cerveau. Et pour étancher la soif de ma curiosité, je me suis déplacé pour aller interroger certaines sages-femmes.

En premier lieu, je rencontre madame Makalé, du CHU-Donka à Conakry, qui a bien accepté de se confier à moi.

L’excision est une pratique que tout un chacun doit combattre car, c’est un acte néfaste vis-à-vis de la société. C’est surtout un agissement qui va au détriment de la femme. Et quant on diminue la femme, c’est la famille qui en pâti.

– Diminution de la femme… c’est-à-dire ?

L’excision est l’enlèvement d’une partie intime chez la femme, elle est née avec. C’est comme si vous amputiez un membre supérieur ou inférieur d’un être humain. Imaginez la suite…

– Est-ce que cette pratique existe partout dans notre pays ?

Oui, avant, mais avec l’implication des organisations non gouvernementales (ONG), je ne dirai pas que c’est complètement fini, mais ça a beaucoup diminué.

– Quelles sont les conséquences médicales de l’excision ?

– Premièrement, l’hémorragie. Deuxièmement, les dystonies. Cela crée des complications, des difficultés à l’accouchement. Dans la vie conjugale aussi, ça peut créer du désaccord avec l’époux.

On entend souvent que la femme qui n’a pas été excisée ne peut pas se maîtriser pendant très longtemps.

Cela dépend plutôt de l’éducation de base de la fille.

On entend aussi que ça ne nuit pas à la santé de la femme ?

Ceux qui font cette pratique ne vous diront jamais la vérité. Le criminel ne peut pas se dénoncer. Il y a de cela quelques années, une rumeur passait vers la haute Guinée comme quoi « les filles qui ne sont pas excisées, je ne sais pas quel malheur va leur arriver ». Du coup, certaines l’ont fait. Mais par contre ce n’était qu’une rumeur.

– Beaucoup pensent que se sont les occidentaux qui nous ont imposé de lutter contre l’excision ?

Pas du tout. Les premiers à s’être engagés sont le docteur Mory Sandan et docteur Djélo.

– Qu’avez-vous à dire à l’endroit des femmes qui pratiquent encore l’excision ?

Abandonnez purement et simplement la pratique. Parce que se sont des actes néfastes à la vie de la femme, à son bien être familial et social.

Un peu plus tard, je passe rendre visite à une vieille femme septuagénaire traditionnaliste et lui demande son avis.

Avant vous pratiquiez l’excision et maintenant pas, c’est ça ?

Oui, vu mon âge, je ne peux plus mais j’apporte des conseils.

Pas de risque de maladies ?

Si, mais on traite les matériaux avant de commencer. Ensuite, on procède l’une après l’autre et on nettoie entre les deux.

Avec les sages-femmes ou les organisations non gouvernementales, vous collaborez ?

Il y a certaines sages-femmes qui le pratiquent aussi donc quand ces gens-là nous disent d’arrêter ils sont un peu mal placés pour le dire. On ne veut pas collaborer quand elles viennent nous mettre en cause et profiter ailleurs. Cette pratique aussi existe depuis longtemps dans nos sociétés traditionnelles. On vient à chaque année pour faire des sensibilisations.

Ces sensibilisations portent-elles leurs fruits ?

Dans certains villages on commence à accepter et d’autres non. Il y a beaucoup de personnes qui n’ont pas eu la chance d’amener le repas à l’école (analphabètes). C’est pourquoi ça ne va pas changer du jour au lendemain.

Sur le chemin du retour, dans le taxi, je repense à mes deux interviews de sages-femmes.

Selon une récente statistique de l’UNICEF (2016), la Guinée occupe par aisance et par excellence le rang des pays où l’excision des femmes est beaucoup plus élevée au monde et sans doute le deuxième Etat africain derrière la Somalie avec un taux de 97 %. Pourtant, il y a des textes juridiques qui condamnent la pratique. Et si on commençait par les appliquer ?

Étiquettes
Partagez

Commentaires